Par le docteur Stéphane CASCUA,
La musique booste très souvent vos performances ! De nombreuses études ont précisé cette notion. Découvrons ensemble comment ça marche et la manière de l’utiliser. Tentons d’en déduire les séances qui s’y prêtent le mieux … et les entraînements qui préfèrent le silence !
En 2007, l’institut national américain de la course de fond a interdit les écouteurs en compétition. Face à l’amélioration des chronos chez les mélomanes, ils avaient considéré cette démarche proche d’une conduite dopante. Les protestations furent telles qu’ils revinrent sur leur décision l’année suivante ! Cette anecdote a le mérite de démontrer que l’influence de la musique sur les performances est une réalité de terrain ! Mais, il s’agit également d’une donnée scientifique. COSTAS et KARAGEORGHIS ont rédigé une longue revue de littérature dont nous inspirerons tout au long de cet article.
Diversion et concentration !
La musique permet de vous divertir, de sortir de votre effort. C’est autant plus vrai que vous vous concentrez sur la mélodie. Vous rentrez alors dans un bain de bien être qu’on appelle aussi le « flux ». Les anglo-saxons parle de « Flow ». Dans ce contexte, tout s’enchaîne avec aisance et vous ne voyez pas le temps passer. Vous pouvez aussi connaitre cet état quand vous lisez un bon bouquin ou lorsque vous vous livrez une tâche artistique épanouissante. Selon les chercheurs de l’université Mc GILL au Canada, la musique permet également de sécréter les hormones du bonheur, les fameuses « endorphines ». Etymologiquement, ce terme signifie : « morphine endogène », c'est-à-dire « substance antidouleur produite à l’intérieur du corps ».
EN MUSIQUE, LA PÉNIBILITE PERCUE DIMINUE DE 12%
« Diversion » et « endorphines », vous comprenez alors pourquoi le corps souffre moins et pourquoi l’exercice parait plus facile. Pour quantifier cet effet, des sportifs ont évalué la difficulté de leur effort. Les scientifiques parlent de « pénibilité perçue». Pour cela il utilisé une cotation chiffrée appelée « Echelle de Borg ». Ainsi, ceux qui écoutaient de la musique voyaient leur pénibilité diminué d’environ 12%. On peut aussi mesurer la poursuite de l’effort à intensité constante. Une étude menée sur la « force endurance » montre qu’une musique stimulante augmente le temps de maintien de 20%.
Motivation et identification
Les musiques énergiques stimulent le corps. Elles activent la sécrétion de deux hormones : la dopamine et l’adrénaline. Le premier de ces messagers sanguin initie le mouvement et assure le plaisir de l’action. Le second active l’organisme et permet l’adaptation à l’effort. Il accélère le cœur, libère le sucre dans le sang pour le mettre à la disposition des muscles. La musique favorise aussi l’identification. Il faut alors solliciter vos souvenirs et votre culture musicale. Il vous suffit d’une musique de film ou d’un clip avec du sport pour que le processus s’enclenche ! On pense bien sûr à « Rocky », à « flash danse » mais aussi à « officier et gentlemen » ou à « Top gun ».
LA MUSIQUE ACCROÎT LE TEMPS DE MAINTIEN DE 20%
Ainsi, vous devenez boxeur, danseur ou pilote de chasse et vous accélérez ! Mais attention ! Parfois la prudence s’impose. Si vous reprenez le sport, si votre condition physique est médiocre, si vous êtes en attente d’un bilan médical, n’abusez pas de la musique pour vous « mettre dans le rouge » ! Il est préférable de rester à l’écoute de vos sensations ! Tout au long de l’exercice, votre organisme vous transmet des messages qu’il est bon d’intégrer pour doser votre effort !
Synchronisation et coordination
Les musiques rythmées donnent la cadence et favorise l’économie du geste. Une étude a été menée par ANSHEL et MARISI. Elle montre que des cyclistes qui pédalent en rythme avec la musique dépensent 7% moins d’énergie que ceux dont le mouvement est dissocié de la mélodie. L’amélioration du rendement peut-être extrapolé aux sports dont le geste est répétitif comme la course à pied. Le phénomène existe aussi lorsque le geste est plus complexe. HAYAKAWA met en évidence que les enchainements de Step sont mieux coordonnés.
BOUGEZ EN RYTHME ET AUGMENTEZ VOTRE RENDEMENT DE 7%
Des effets bénéfiques sont également constatés avec les musiques douces au rythme lent. Dans ce contexte, les chercheurs mettent en évidence une diminution de la fréquence cardiaque pour une même vitesse de course ! Là encore, vous dépensez moins d’énergie, vous êtes plus rentable. Pour tester cette notion, revoyez les « Chariots de feu », enivrez-vous des images du footing sur la plage puis allez courir avec la bande originale !
Ça ne marche pas tout le temps !
L’effet facilitateur de la musique s’émousse quand l’intensité de l’effort augmente. Au-dessus du seuil de l’essoufflement, notamment lors des séances de fractionné sur piste, vos sensations corporelles envahissent votre cerveau et la mélodie ne parvient plus à vous divertir. Dans une même logique, la musique est moins efficace chez le sportif de haut niveau.
A HAUTE INTENSITÉ MIEUX VAUT ÉCOUTER … SON CORPS
En effet, il a l’habitude de percevoir les messages de pénibilité élevée émis par son organisme. Mieux encore, il en a besoin pour doser au plus juste son effort et même pour l’intensifier ! C’est peut-être aussi votre cas si vous aimez vous concentrer sur les messages de votre corps tout au long de l’exercice. Dans ce cas, il est probable que vous préférez courir sans musique. Et c’est peut-être mieux pour vos oreilles.
Quelle musique et quand ?
La séance au seuil de l’essoufflement constitue l’entraînement idéal pour écouter une musique énergique et rythmée. Vous souffrirez moins, vous serez plus rentable, vous soutiendrez plus longtemps votre effort. Utilisez des musiques que vous aimez et que vous associez au sport et à l’action. Lors du travail sur piste ou sur home trainer, au voisinage de la fréquence cardiaque maximum, il est peut être préférable d’écouter votre corps pour doser votre effort. Lors des sorties longues ou de vos séances de récupération, appréciez une musique plus douce. Elle augmentera la sécrétion d’endorphine propre aux exercices de longues durées. Elle balancera lentement la cadence de vos foulées. Elle saura apaiser votre système cardiovasculaire et vous améliorerez votre coordination. Enfin, si vous débutez, vous auriez intérêt à éviter les musique trop énergique qui vous mènerait au surmenage.
DES PLAYLISTS AU RYTHME DE VOS FOULÉES
Vous savez que la fréquence idéale de vos foulées avoisine180 par minute. Il existe des playlist vous indiquant de ce rythme. Vous pouvez ainsi réduire l’amplitude, augmentez la cadence et gagner en rendement. Cependant, il est préférable d’utiliser cette méthode uniquement pour quelques séances techniques. En effet, vous constaterez que la musique qui correspond n’est pas très agréable …
N'abusez pas de la musique !
Attention au volume et à la durée de l’écoute. L’oreille est une expansion du système nerveux central, les tissus abîmées peinent à se régénérer ! Les filaments cellulaires chargées de vibrer au rythme du son risquent de se briser en cas de violentes variations de pression. Rapidement, des troubles de l’audition peuvent survenir. Pire encore, les secteurs du cerveau ne recevant plus d’information ont tendance à produire des bruits anarchiques : les acouphènes, ces sifflements d’oreille définitifs qui empoisonnent la vie, de jour comme de nuit ! Concernant le volume, restez impérativement dans la zone bleue proposée par votre téléphone. A propos de la durée, faites une pause après 45 minutes.
VOLUME EN ZONE BLEUE, DURÉE MAX 45 MN
Lors de vos footings sur route ou en milieu urbain, bannissez les casques à « réduction de bruit ». Vous devez impérativement, restez à l’écoute de la circulation. 18 piétons se font renverser chaque jour en France ! A vélo, proscrivez la moindre musique ! Une vigilance absolue s’impose ! 250 cyclistes meurent tous les ans sur le macadam français ! … Le disco à vélo, c’est en cours de RPM 😊 !
ÉVITEZ LA MUSIQUE AU MILIEU DES VOITURES
Enfin, de temps à autre, coupez le son artificiel pour profiter de l’instant présent. Accueillez le chant des oiseaux au petit matin, le bruissement du vent dans les feuilles ou le crissement de vos foulées sur le gravier. Percevez avec plaisir, les bruits de la ville qui s’éveille. Imprégniez-vous de vos sensations respiratoires, articulaires et musculaires pour doser votre effort bien mieux qu’avec l’électronique embarquée de votre montre connectée !
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