Le sénior perd des muscles et de la force. Rapidement, les conséquences sportives et esthétiques sont visibles. Plus tard, la perte d’autonomie et les chutes menacent. Une prévention précoce est indispensable, le sport est essentiel !
Par le docteur Stéphane CASCUA, médecin du sport.
L’origine de la réduction de la masse musculaire est multifactorielle : les hormones, la nutrition, l’oxydation, la mort des cellules musculaires ou de neurones moteurs. Mais la réduction insidieuse de l’activité joue un rôle crucial ! C’est une bonne nouvelle ! Il suffit de s’y mettre ! A vos haltères !
Pourquoi tant de dégâts ?
Les études sont unanimes, la force et le volume des muscles régressent avec les années. Entre 30 ans et 80 ans, on assiste à une perte de 30% de la masse musculaire. La force diminue de 1,5% par an à partir de 50 ans et de 3 % par an à partir de 70 ans. Le fonctionnement du muscle est encore plus altéré que son volume. Les fibres microscopiques utiles à la contraction sont peu à peu remplacées par du tissu fibreux et de la graisse. La réduction des hormones sexuelles est en partie responsable de cette involution. Les courbatures et les claquages se réparent moins bien. Les cellules de réserves appelées «satellites» sont moins nombreuses. Elles se multiplient de moins en moins. Parfois même, elles s’autodétruisent, on parle d’apoptose. Les hormones produites par les glandes sexuelles diminuent avec les années. Ce phénomène est relativement brutale chez la femme, c’est la ménopause ; Il est plus insidieux chez l’homme, c’est l’andropause. Plus tôt, vers 35 ans, la fameuse DHEA voit son taux s’abaisser. Elle est produite par la glande surrénale, situé au-dessus du rein. Elle ressemble aux hormones sexuelles. Plus précocement encore, vers 18 à 25 ans, l’hormone de croissance diminue également. Toutes ces substances ont des fonctions anabolisantes, elles stimulent la construction des tissus, notamment du muscle ! Dans le cerveau et la moelle épinière, bon nombre de neurones moteurs dégénèrent. Les faisceaux musculaires correspondants régressent à leur tour. Mais, le processus inverse aussi est très probable ! L’absence de sollicitation musculaire contribuerait à faire mourir les neurones ! Ce sont surtout les « fibres rapides» à l’origine des contractions puissantes qui diminuent … sûrement par manque de travail spécifique !
La diminution du nombre de petits vaisseaux présents entre les fibres engendre une réduction du volume et des performances musculaires. Avec le temps … et en cas d’effort excessif, les muscles « rouillent» et «s’enflamment». L’oxygène brûlant l’énergie nécessaire à la contraction oxyde aussi le tissu musculaire. Avec les années le système immunitaire se dérègle, il agresse le muscle et d’autres tissus vieillissant. Le nettoyage des courbatures est aussi à l’origine d’une inflammation. Les globules blancs fossoyeurs font parfois du zèle et éliminent trop de fibres musculaires. Même si la modération des entraînements s’impose, un entretien musculaire est indispensable. Le manque de sollicitation est responsable de plus de 50% de la fonte musculaire du senior.
Perte de muscle : des conséquences tous azimuts !
Bien avant de vous affaiblir, le manque de muscle vous fait grossir et favorise le diabète. 40 à 50 % de notre corps est constitué de muscle. Près du quart des fibres musculaires se renouvellent chaque jour. Vous comprenez pourquoi ce tissu consomme autant d’énergie notamment de sucre … même au repos ! Ainsi, voir fondre sa masse musculaire, c’est laisser le sucre s’accumuler dans les vaisseaux et le diabète s’installer. C’est aussi brûler beaucoup moins de calories quotidiennement et stocker les graisses ! Autrefois, on pensait que seuls les sports d’endurance permettaient de lutter contre le diabète et le surpoids. On sait désormais que la musculation y contribue tout autant !
Si vous êtes plus fort, vous assumez aisément les contraintes du quotidien : porter les courses, déplacer un meuble. Un vrai confort ! Plus tard, cette aisance devient un facteur d’autonomie et de maintien à domicile ! La mise en institution est reportée voir inutile ! De surcroît, il est démontré qu’être plus musclé réduit le risque de chute. Mieux encore, si vous tombez, vous vous fracturez moins souvent le fémur. C’est logique, la musculation, en tirant sur les os, a contribué à les rendre plus solide. Des muscles plus volumineux se comportent aussi comme des amortisseurs. En se contractant à l’impact, ils diffusent l’onde de choc à la manière d’un casque ! Quand on sait que 30% des victimes de fracture du col du fémur décèdent de leur complication et qu’une même proportion perdent leur autonomie, capitalisons du muscle au plus vite !
Musclez vous ! … dès que possible !
Il a été mis en évidence que la vitesse de marche à un âge avancé était corrélée à la force quelques dizaines d’années plus tôt ! Investissez pour votre retraite, faites de la musculation ! S’il est conseillé de réaliser ce bon placement le plus précocement et le plus assidûment possible, il n’est jamais trop tard ! Quel que soit votre âge, vous pouvez augmenter votre force musculaire. Selon FRONTERA et HOLLOZY, un programme de musculation de 3 à 4 mois permet de doubler la force des seniors. Cet excellent résultat est constaté jusque dans les maisons de retraite ! Les jeunes ne progressent pas plus ! Au cours des premières semaines, une amélioration rapide est obtenue grâce à une meilleure coordination. Ce phénomène neurologique passe par une synchronisation des fibres du muscle sollicité et un plus grand relâchement des muscles opposés. Dans les mois suivant, le nombre de fibres s’accroît de 30% et les muscles augmentent leur volume de 10%. Un apport supplémentaire en protéines améliore encore un peu le résultat. Bien évidemment cette progression n’est pas acquise définitivement, il faut poursuivre l’entraînement pour stabiliser la musculature. L’activité physique stimule la production des fibres musculaires en réponse aux microlésions. La musculation provoque aussi une libération d’hormones sexuelles et anabolisantes. L’entraînement cardiovasculaire fractionné stimule la sécrétion d’hormone de croissance. Ces réactions naturelles permettent, à l’issue des séances, de reconstruire un muscle encore plus fort. Le travail en endurance permet aussi de prendre de la masse musculaire car il augmente le calibre et la quantité de vaisseaux sanguins traversant les muscles.
Quels sports pour la force des séniors ?
Les entraînements de musculations traditionnels se montrent très efficaces. La séance doit comporter 5 à 10 mouvements. Pour chacun d’eux, il faut réaliser 2 à 3 séries de 10 à 12 répétitions séparées de 2 à 3 minutes de récupération. Les charges doivent se situer entre 60 et 80% de la force maximum, c’est-à-dire suffisamment lourdes pour que la dernière répétition soit très difficile ou incomplète. Ce type de séance se révèle très contraignant sur le plan locomoteur et cardiovasculaire notamment en cas d’hypertension. Il est parfois contre-indiqué ou doit être alterné avec des entraînements moins pénibles.
La « musculation endurance» réalise un excellent compromis. Cette fois, il s’agit d’enchaîner sans récupération de nombreux mouvements différents et complémentaires. Les séries sont de 30 à 40 répétitions et les poids utilisés sont légers. Il faut avoir la sensation de pouvoir effectuer 5 répétitions supplémentaires. Ce « parcours de musculation» dure 20 à 40 minutes. Comme vous l’avez compris, la « musculation en endurance» est efficace pour entretenir la fonction et le volume musculaire, notamment grâce au maintien d’une vascularisation abondante. Ce type d’adaptation peut aussi être obtenu à l’occasion d’activité foncière. Au cours de votre footing n’hésitez pas à grimper quelques cotes … et pourquoi pas des escaliers. A vélo, mettez parfois de gros développements dans les bosses. Typiquement, l’aviron associe renforcement musculaire général et travail cardiovasculaire. En salle, le rameur et l’elliptique font de même surtout si, de temps à autre, vous augmentez les résistances. Attention, n’abusez pas de ce type d’entraînement, il s’avère très sollicitant pour le cœur. A la longue, eux aussi favorisent l’hypertension artérielle. Alternez avec des entraînements faciles en aisance respiratoire. Demandez conseil à votre cardiologue. Encore une fois, vous constatez que la variété des séances et des disciplines sportives contribuent à entretenir votre force et votre volume musculaire … au grand bénéfice de votre santé !
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