A vingt trois ans, Eric dispute son premier marathon. Voilà plusieurs mois qu’il prépare sa course. Tout l’hiver, au petit matin, emmitouflé dans son coupe-vent, il a arpenté à petites foulées les trottoirs luisants de la capitale. Le soir, hypnotisé par les éblouissants projecteurs dominant les stades, il a tournoyé sur les pistes de tartan.
Aujourd’hui, le printemps éveille les allées fleuries sillonnant les jardins des Champs-Elysées. L'Arc de Triomphe attend Eric, non loin d’ici, au bout de la plus belle avenue du monde comme pour consacrer sa passion pour la course de fond. Ce matin, à l’image de Philipidès, il doit parcourir quarante deux kilomètres, la distance reliant la ville de Marathon à Athènes. Le célèbre guerrier grec devait annoncer au roi la victoire de ses troupes. Sa mission accomplie, il mourut aux pieds de son souverain, épuisé par cette terrible épreuve. En vérité, le trajet du messager fut probablement bien plus long que la compétition mythique de l'athlétisme. Il a sûrement arpenté la région sur plus de 200 kilomètres avant de succomber. Cependant, il est étrange de constater que le marathon ne tient ses lettres de noblesse qu’à cette sinistre anecdote. Eric en convient : « Comme moi, ces 30000 coureurs prêts au départ, massés tout près de la Concorde, ont pris rendez-vous pour lutter contre la mort ».
A mi-parcours, Eric se sent vraiment très bien. « Attends un peu » lui dit Etienne, son ami plus expérimenté : « Un marathon, c’est 7 kilomètres... du trente-cinquième au quarante-deuxième ! ». Le « Mur » :c’est ainsi que les initiés appellent cette subite défaillance survenant peu de temps avant l’arrivée. « Le plus terrible reste à venir ! » reprend Etienne. Il ne croit pas si bien dire...
Soudain, Eric s’arrête, il est pris de violents maux de tête. « J’ai l’impression que mon cerveau va exploser » lance-t-il à son ami. Puis il vomit brutalement, chancelle, s’effondre et perd connaissance !
Dans le contexte d’une grande épreuve sportive, la couverture médicale est parfaite. Les secours se rendent sur les lieux du drame dans les minutes qui suivent. Le SAMU transfère Eric dans un service de neurochirurgie. Le diagnostic est confirmé : rupture d’anévrisme. Sa prise en charge précoce permet une intervention rapide. Une petite pince d’argent appelée «clip » est posée sur son artère lésée. Quelques semaines plus tard, il quittera l’hôpital sans séquelles.
Il y a quelques jours encore, Eric passait le week-end chez ses parents. Il réalisait ses longues courses dominicales, seul dans la forêt de Fontainebleau. Ce qui ne fut qu’un accident aurait été un drame à classer parmi les morts subites du sportif.
En effet, en l’absence de réanimation efficace, parfois même brutalement, ces accidents mènent au décès du patient. En France, chaque année, environ 80 sportifs «en pleine forme », meurent par rupture d’anévrisme.
L’anévrisme cérébral est une petite dilatation sur les artères du cerveau. Comme une hernie sur une chambre à air, il constitue le point de faiblesse. En cas d’hyperpression, cette zone gonfle. Lorsque son diamètre atteint dix millimètres le risque d’éclatement augmente considérablement. A la faveur d'une montée brutale de la tension artérielle... comme au cours de l’effort... la paroi peut se déchirer : c’est la rupture d’anévrisme.
Le sport est une cause d’hypertension artérielle. L’effort en lui-même augmente la pression. L’entraînement, mal conduit, provoque parfois insidieusement une véritable hypertension artérielle à l’exercice comme au repos.
Parmi nous tous, les sportifs «bien portants » et asymptomatiques, nous sommes 5% à être porteurs d’un anévrisme artériel intracrânien. Dans ces conditions, peut-on affirmer que l’activité physique soit bénéfique pour notre santé ?
Trois ans après l’accident d’Eric, je fais sa connaissance. Il travaille comme ingénieur en informatique. Il souhaite reprendre plus assidûment le sport. Il me consulte car il sollicite un certificat de non contre-indication au... marathon !
Sa visite médicale d’aptitude se révèle sans particularité. Il n’a aucune séquelle neurologique. Sa tension artérielle est normale au repos. Comme il se doit, elle s’élève modérément après 30 accroupissements. Les compte- rendus des examens passés à l’issue de son accident sont particulièrement rassurants. Une artériographie a été pratiquée. Elle consiste en l’injection d’un produit opaque dans les artères du cerveau. Quelque temps après l’intervention, le «clip », la petite pince fermant l’artère déchirée, est bien en place. Surtout, il n’existe plus aucun anévrisme intracrânien.
Par acquis de conscience, je lui prescris une épreuve d’effort. Au cours de ce test on peut mesurer la tension artérielle jusqu’à la fréquence cardiaque maximale. Là encore, la tension monte normalement.
Alors, Eric présente-t-il une contre-indication à la course de fond ? A l’inverse de chacun d’entre-nous, il est sûr de ne pas avoir d’anévrisme intracrânien. L’artériographie l’a bien montré. De plus, le sport, intelligemment pratiqué, peut l’aider à conserver une tension artérielle normale. Les exercices d’endurance sont une bonne prévention contre l’hypertension artérielle. De nombreuses études l’ont démontré. Néanmoins, je lui donne quelques conseils d’entraînement. Je lui propose d’éviter les séances trop intenses, notamment celles dites de vitesse maximale aérobie. Les sorties de qualité n’auront lieu qu'une fois par semaine, elles se feront «à la limite d’essoufflement », «au seuil », disent les coureurs avertis. Coup de chance, ce sont les plus efficaces pour progresser ! Enfin, je lui signe son certificat d’aptitude au marathon !
L’effort est une véritable crise d’hypertension !
L’exercice physique augmente la tension artérielle. Vous le savez et c’est évident. Pour apporter aux muscles en action plus de sang porteur d’oxygène, le cœur s’accélère. Le débit de la pompe s’accroît et la pression dans les tuyaux s’élève.
Observons ce qui se passe au cours d’une épreuve d’effort. A l’hôpital, notre sportif est installé sur un vélo désespérément immobile. Un électrocardiogramme surveille le comportement électrique de son cœur. Un brassard mesure régulièrement sa tension artérielle.
Lorsqu’il est assis sans bouger sur sa machine, elle est de 13 / 8. La signification de ces chiffres est simple. Lorsque le cœur se contracte, la pression dite «systolique » régnant dans l’artère de son bras pourrait soulever 13 centimètres de mercure. Quand il se relâche, la pression dite «diastolique » n’en maintiendrait que huit.
Dans les conditions de repos, la tension normale est inférieure à 14 / 9. L’hypertension artérielle se définit par des chiffres supérieurs à 16 / 9,5. Entre ces bornes, le sujet présente une tension artérielle "limite". Comparativement, que se passe-t-il pendant l’effort ?
Lorsque notre sportif commence à pédaler, la tension artérielle augmente progressivement. A fréquence cardiaque maximale, le chiffre de la «systolique » avoisine fréquemment 24. Pourtant, ce profil tensionnel d’effort est considéré comme normal. Pendant le sport, les chiffres sont très supérieurs à ceux caractérisant l’hypertension artérielle. L’exercice serait-il une pathologie tolérée par les médecins ?
Le corps connaît ses limites. A partir de 25 de tension systolique, les petits vaisseaux du cerveau... même normaux... peuvent se rompre ! Lors des séances intenses, à proximité de la fréquence cardiaque maximum, les contraintes mécaniques sur les capillaires crâniens sont énormes. Aussi efficace pour progresser que pour vous surmener, parfois dangereuse pour la santé, ce mode d’entraînement doit être utilisé à dose homéopathique !
Je vous laisse imaginer ce qui se produit lorsque vous êtes porteur d’une hypertension artérielle dès le repos... Les chiffres grimpent de façon vertigineuse, atteignant parfois plus de 30. La pression dépasse alors les 25 centimètres de mercure fatidiques pour des efforts apparemment modérés...
Mais les conditions sont parfois encore plus délicates. Les activités physiques à forte composante cardio-vasculaire ne sont pas les plus nuisibles. Dans les sports dits «statiques » la situation s’avère encore plus périlleuse. Lorsqu’une contraction musculaire est maintenue de façon intense et prolongée ,comme au judo ou en musculation, le système vasculaire est mis à rude épreuve.
Le muscle puissamment et longuement contracté écrase les vaisseaux qui le traversent. Tout se passe comme si le cœur cherchait à l’approvisionner malgré l’obstruction. Alors, il donne un maximum d’élan au sang qu’il propulse., il pousse comme un damné. La pression augmente d’autant plus qu’une bonne partie des issues est obstruée par les muscles en action. Le sang s’engouffre alors dans les orifices disponibles. Malgré une régulation fine, la tension dans les artères menant au cerveau ne peut qu’augmenter dangereusement !
Le sport peut favoriser la survenue d’une hypertension artérielle
C’est un fait, l’entraînement cardio-vasculaire trop intense et les sports statiques provoquent de véritables crises hypertensives. Vous pensez qu’il s’agit d’un mal aigu, qu’il peut s’avérer dangereux mais reste provisoire ! Loin s’en faut, la situation est plus perverse que vous ne l’imaginez car le processus dégénère fréquemment. Insidieusement s’installe une maladie chronique, permanente : une véritable hypertension artérielle de repos.
Tout se passe comme si les systèmes de régulation de la tension étaient trop fréquemment confrontés à une tension artérielle élevée. Ils revoient la moyenne à la hausse et la tension de repos s’élève.
Le plus souvent, le médecin du sport constate une tension artérielle «limite ». Assis sur son vélo en attendant le test, notre sportif est à 14,5 / 9. Ce chiffre persiste malgré l’ambiance conviviale et détendue mise en place par de chaleureuses infirmières. Ce n’est donc pas l’émotion du moment qui est responsable de cette tension artérielle située juste au-dessus des normes. Rapidement, le contexte se confirme car, dès le début de l’épreuve d’effort, la pression artérielle s’élève trop rapidement. Le profil tensionnel se révèle nettement anormal. L’exercice décompense cette tension artérielle limite en véritable hypertension artérielle d’effort.
De nombreux individus sont victimes d’hypertension artérielle dite «labile ». Ce sont souvent des hommes âgés d’une quarantaine d’années. A l’occasion d’un stress, … comme une visite médicale…les chiffres s’élèvent au-dessus des normes. Les médecins parlent de «syndrome de la blouse blanche ». Vous comprenez alors la nécessité de détendre le patient, de renouveler les mesures, avant de porter le diagnostic d’hypertension. Cependant, les personnes souffrant d’hypertension artérielle «labile » soumettent leurs artères à d’importantes agressions mécaniques à chacune des émotions inhérentes à la vie quotidienne. Cette «hypertonie vasculaire » s'associe parfois à des chiffres tensionnels trop élevés au cours de l'exercice.. Hypertensions artérielles "labile" et "d'effort" font le lit de la «véritable » hypertension. Elle surviendra quelques années plus tard. Il n’existe pas de limite nette entre ces différentes entités. Le processus pathologique s’inscrit davantage dans la continuité. Ainsi, les conseils donnés aux sportifs dont les chiffres tensionnels sont trop élevés à l’effort se révèlent d’une importance capitale pour prévenir ou retarder la survenue de l’hypertension artérielle de l’âge mur.
Une anomalie du profil tensionnel constitue l’un des points clés à rechercher lors d’une épreuve d’effort proposée dans le cadre d’un suivi de préparation physique. En effet, elle permet le diagnostic précoce de «surentraînement ».
Cet état physiologique est préoccupant. L’entraînement est trop intense ; parfois les séances sont trop longues ou trop fréquentes. Notre sportif s’épuise. Ses performances régressent. La réaction la plus fréquente s’avère particulièrement toxique : Constatant la diminution de ses résultats notre athlète se concocte une préparation plus dure encore. Cette fois, plus qu’ altérer sa prestation sportive, son comportement dégrade sa santé..
Le «surentraînement » est un syndrome, il regroupe plusieurs signes.
- chute des performances... alors que les thèmes de la préparation physique semblent adaptés,
- diminution du goût pour l’entraînement,
Initialement tout se passe comme si l’organisme luttait pour assumer ces contraintes physiologiques. Il baigne dans les hormones stimulantes. Elles sont identiques à celles du stress.
- irritabilité,
- trouble de l’endormissement, insomnie,
-perte de l’appétit,
- fréquence cardiaque trop élevée,
au repos
, mais aussi
à l’effort comme si le moindre exercice provoquait l’emballement du système cardiovasculaire,
- tension artérielle trop élevée,
au repos : tension artérielle limite ou nette hypertension
à l’effort : profil tensionnel au-dessus des normes
Dans ce contexte, l’élévation de la tension artérielle est aisément compréhensible. Sous l’influence des hormones stimulantes le cœur bat plus vite. Il pousse plus de sang. Mais surtout, ces même substances réduisent le diamètre des vaisseaux sanguins. Plus de débit dans de moins gros tuyaux, la pression augmente inévitablement.
Si le sportif insiste et intensifie son programme d’entraînement, les signes d’épuisement du système de stimulation ne tardent pas à s’installer
- fatigue, somnolence,
- hypersomnie, endormissement fréquent,
- boulimie,
- fréquence cardiaque trop basse,
au repos et en récupération
à l’effort, comme si le corps ne parvenait plus à monter en puissance, à assumer l’intensification de l’exercice.
- tension artérielle trop basse,
au repos ou en récupération ,avec risque de malaise, notamment à l’arrêt de l’effort
à l’effort entraînant une réduction de l’apport en oxygène pour les muscles en action.
A ce stade avancé de surentraînement, il faut souvent des mois de repos relatif et de récupération pour que notre sportif retrouve son niveau antérieur.
En revanche, comme vous le constatez, l’hypertension artérielle d’effort s’intègre à la première phase de surmenage. Mieux que cela, elle se montre particulièrement précoce. En effet, le sportif n’a pas encore constaté la chute de ses performances. Les autres signes restent discrets. L’irritabilité est imperceptible... sauf pour l’entourage !
Le rôle du médecin du sport revêt alors toute son importance. Grâce à l’hypertension artérielle d’effort, il effectue précocement le diagnostic de «surentraînement ». Pour les performances et pour la santé de son athlète, il doit l’informer, lui expliquer et lui donner de nombreux conseils. S’il ne devait en retenir qu’un seul, qu’il se souvienne de celui-ci : « Reposez-vous, vous allez progresser »
En effet, entraînement et surentraînement résultent du même processus. Scientifique, médecin et entraîneur parlent de «décompensation / surcompensation ». Ce mode de réflexion résulte d’étude réalisée sur la teneur du muscle en glycogène, l’indispensable réserve énergétique obtenue à partir des sucres de l’alimentation. Ainsi, on considère que de nombreux paramètres physiologiques évoluent de la même façon.
A l’occasion d’un exercice vous consommez votre glycogène, votre stock énergétique baisse. L’entraînement vous fatigue. A l’issue de votre séance vous n’avez pas progressé, vous avez régressé, vous avez «décompensé ». Après votre footing dominical, si vous tentez de repartir en sens inverse en améliorant votre chrono, vous serez déçu !
En effet, c’est à l’occasion du repos bien mérité, notamment grâce à une alimentation riche en glucides, que vous allez récupérer. Mieux que cela, comme si l’organisme envisageait une nouvelle agression, il va anticiper. Il augmente sa réserve de glycogène. C’est la surcompensation.
Ainsi, l’organisme progresse. Le plus gros réservoir permet une plus grande autonomie. Vous pouvez désormais courir plus longtemps.
Le surentraînement résulte d’un déséquilibre entre entraînement et récupération. Dans ces conditions, la décompensation prédomine sur la surcompensation. Les séances sont trop longues, trop fréquentes ou trop intenses. La régénération est trop ou de qualité insuffisante. L’alimentation, par exemple, est trop restreinte en sucres ou en féculents.
Vous avez cumulé les décompensations, vous êtes épuisé. Mais, à cette phase de surentraînement, il suffit de quelques semaines d’entraînement doux pour vous requinquer. Finalement, vous surcompensez et vous progressez.
A cette phase, le traitement de la «maladie du surentraînement » ne passe pas par le repos complet. L’activité physique proposée ressemble à s’y méprendre à l’exercice anti-hypertension. artérielle.
Récemment Gérard, un triathlète de bon niveau, m’a consulté pour suivi d’entraînement. Je conclus par mon slogan laconique et provocateur « Reposez-vous, vous allez progressez ». Incrédule, il s’étonne. Je dois expliquer, démontrer, retrouver les indices de surentraînement dans sa vie sportive et personnelle pour le convaincre. Enfin, il adhère à mon programme. Pour s’affûter en vue d’une grosse épreuve prévue dans 2 mois, il va se régénérer. Tout l’entraînement dur a déjà été fait. Trois séances par semaine sont suffisantes, une dans chaque discipline : natation, vélo et course à pied. Elles durent entre 30 minutes et une heure et demie, toujours en aisance respiratoire, sans aucune sensation de difficulté.
Le lendemain de sa compétition, il a la gentillesse de me téléphoner : « Docteur je n’ai jamais appuyé aussi fort sur les pédales, j’étais en grande forme. Ma fraîcheur m’a permis de réaliser mon meilleur temps sur cette distance ».
Il poursuit encore un mois son entraînement «allégé ». A la fin, je le revois pour réaliser une nouvelle épreuve d’effort. Il faut contrôler l’amélioration de son état de santé. Ses performances se sont améliorées. Parallèlement à la régression de tous les symptômes du surentraînement, l’hypertension artérielle d’effort et de repos a disparu ! ... Le sport en était responsable, le sport l’a soignée !
Le sport réduit le risque d’hypertension,
Le sport est un traitement de l’hypertension artérielle !
En France, nous sommes 7 millions d’hypertendus, soit 10% de la population adulte et 45% des plus de 65 ans ! Le quart des sujets victime d'hypertension ignore le diagnostic. Le quart refuse de soigner et seule la moitié bénéficie d'un traitement. Le quart fait surveiller régulièrement sa maladie. Enfin, on peut considérer qu'uniquement 20% des hypertendus ont retrouvés de chiffres normaux.
De plus, de très nombreuses hypertensions artérielles «limite », «labiles » ou «d’effort » augurent probablement d’authentiques hypertensions artérielles. Cette maladie porte le nom de « tueur silencieux ». Insidieusement, elle provoque des lésions sur les vaisseaux qui s’exprimeront tardivement, voire soudainement ! Statistiquement si la tension artérielle se situe monte de 3 unités, le risque de crise cardiaque est multiplié par 5 et celui d'accident vasculaire cérébrale par 10.
Avec les cancers, ces deux drames constituent les trois premières causes de mortalité en France. Certains comportements favorisent l’hypertension et doivent faire l’objet de conseils hygiéno-diététiques. Il s’agit de la consommation excessive de sel ou d’alcool ainsi que du tabagisme. Mais la sédentarité est reconnue pour faciliter la survenue d’une hypertension artérielle. C‘est dire l’importance de l’exercice pour chacun d’entre nous.
En effet l’activité bien menée est une prévention efficace et même une thérapeutique de l’hypertension artérielle. Mais comment l’expliquer ?
Bien sûr, tous les sports n’ont pas ces propriétés. Pour obtenir de tels résultats, il faut pratiquer des activités dites d’endurance. Il s’agit essentiellement de la marche, du footing, du vélo ou de la natation, à intensité moyenne. Le cardiotraining proposé dans les salles de fitness se révèle aussi très adapté. Les nombreux appareils reproduisent les mouvements des disciplines les plus favorables. Les rameurs, steppers et simulateurs de ski de fond s’apparentent à des activités d’endurance. Le cardiotraining s’est maintenant imposé à côté du matériel de musculation. Les salles de sports ont, à juste titre, surfé sur la vague du «sport santé ». Elles ont proposé, en parallèle à la musculation, une activité cardiovasculaire destinée à compenser les méfaits du renforcement avec charge lourde. Les effets, sur l’organisme, de toutes ces disciplines s’opposent à ceux produits par les efforts cardiovasculaires d’intensité élevée. Ils se situent à l’inverse de ceux obtenus par les exercices statiques comme la musculation lourde.
Dans ces activités dites dynamiques, une volumineuse masse musculaire, notamment celle des membres inférieurs, est sollicitée. Elle alterne rapidement, au rythme des foulées ou du pédalage, contraction légère et relâchement. Ce processus produit au sein des muscles un véritable pompage du sang. Ce dernier est comme aspiré. Le cœur n’a plus besoin de lui donner autant d’élan, il pousse moins fort et la tension au cours de l’exercice s’élève beaucoup moins. Au repos également, cœur et vaisseaux s’habituent à travailler à un régime de pression inférieur.
Vous comprenez que plus le volume musculaire est important, plus le phénomène de pompage se révèle efficace. A ce titre, les activités sollicitant simultanément membres supérieurs et membres inférieurs se révèlent particulièrement efficaces. Il peut s’agir de la natation, du ski de fond, de l’aviron ou du cardiotraining simulant toutes ces activités.
La fréquence du mouvement participe également à l’efficacité. Le vélo met bien en évidence l’importance de ce paramètre. Pédaler lentement contre une forte résistance, emmener un «gros braquet » peuvent favoriser l’hypertension. A chaque tour, la contraction est puissante et prolongée. L’activité s’apparente presque à de la musculation ! De plus, l’intensité de travail cardiovasculaire est souvent élevée. Si au contraire le cycliste «mouline sur un petit braquet », pour la même vitesse de déplacement la contraction est moins puissante et plus fréquente. Le relâchement musculaire se reproduit plus rapidement. Le pompage du sang est optimisé et le vélo redevient favorable à la régulation de la tension. Au cours même des épreuves d’effort, pour une même puissance de travail, je propose parfois aux cyclistes de réduire la charge et d’accélérer la vitesse de pédalage. Le plus souvent, on constate une diminution de la tension artérielle. Lorsque le profil tensionnel se situe aux limites supérieures de la normale, cette petite démonstration pédagogique s’avère très efficace. Notre cycliste est alors plus motivé pour modifier sa technique de pédalage
De la même façon, les méthodes de musculation peuvent être modifiées pour devenir moins nuisibles à la santé cardiovasculaire. Certains concepts pourraient même se révéler intéressants. Ainsi, les parcours de musculation proposent de soulever des charges légères sur de longues séries de 30 à 40 répétitions. La cadence de mouvements est rapide. Après chaque exercice, les pauses sont à proscrire, mais il faut changer de mouvement. Idéalement, chacun des gestes sollicite un grand groupe musculaire, voire associe les membres supérieurs et les membres inférieurs. Ainsi, le renforcement musculaire généralisé s’apparente beaucoup plus à une activité d’endurance. Le «pump », très en vogue dans les salles de fitness, reprend un peu ce concept. L’activité est réalisée en groupe et en musique. Chacun utilise les charges adaptées à son niveau. La pratique de la musculation évolue favorablement...
D’autres modes de raisonnement permettent de mieux comprendre l’efficacité de certains sports sur la prévention et le traitement de l’hypertension artérielle. Une petite formule mathématique peut aisément vous éclairer :
Pression = Débit x Résistance
Plus le débit s’élève dans un tuyau plus la pression s’élève. Plus les résistances augmentent, par exemple par réduction du diamètre du conduit, plus la pression s’accroît. Jusque là tout est logique.
A l’effort ,la fréquence cardiaque s’accélère, le débit sanguin s’élève proportionnellement. Pourtant, au cours des sports d’endurance pratiqués à intensité modérée, la pression ne monte pas autant. Conclusion : les résistances périphériques ont chuté..., notamment grâce à l’ouverture des vaisseaux situés dans les muscles et grâce à l’aide du phénomène de pompage. Tout est cohérent. Ainsi, on peut considérer une activité physique bien conçue comme un entraînement à la réduction des résistances périphériques. Ce processus se poursuit au repos et la tension artérielle diminue ou est mieux régulée.
De la même façon, vous savez qu’un athlète d’endurance présente une fréquence cardiaque de repos plus basse qu’un sédentaire. Vous pensez que ce phénomène résulte de l’augmentation du volume du cœur qui, propulsant plus de sang à chaque battement, doit se contracter moins fréquemment. C’est un peu vrai mais un autre mécanisme justifie cette constatation. Avec l’entraînement, après l’effort et pendant toute la phase de repos, l’organisme semble favoriser la récupération. La concentration en hormones de stimulation, les cathécolamines, chute. La fréquence cardiaque diminue, les vaisseaux s’ouvrent... et la tension diminue. Les scientifiques parlent de «réduction du tonus sympathique ». De plus l’entraînement en endurance provoque le développement de nombreux petits vaisseaux dans les muscles. Cette adaptation permet d’apporter plus de sang et d’oxygène aux masses musculaires en action. Le repos venu, une quantité plus importante de vaisseaux se dilate. Ainsi, les résistances périphériques chutent encore plus nettement. La tension artérielle est d’autant mieux régulée.
Pour traiter une hypertension artérielle, la recherche a démontré que l’activité physique est tout aussi efficace qu’un médicament. Cette thérapeutique ne peut-être proposée que pour les hypertensions modérées, inférieures à 17 / 10 au repos. Aucune cause ne doit être retrouvée. Dans ces conditions, l’hypertension artérielle est dite «cryptogénétique ». Elle survient à l’âge mur par altération progressive de la régulation. Ces imperfections de fonctionnement sont à forte composante génétique. Très fréquemment il existe un cas d’hypertension parmi les parents du patient. Bien sûr, le sport bien conçu est particulièrement adapté pour venir à bout d’une hypertension artérielle liée à une pratique physique anarchique.
Les sports les plus adaptés vous sont désormais bien connus. Ce sont les disciplines dites d’endurance. la marche, le footing, la natation, le vélo, le cardiotraining, le ski de fond etc. Vous avez même compris quelques subtilités, notamment concernant le cyclisme. Il est largement préférable de mouliner que d’ «envoyer de grands braquets ». Quelles que soient les circonstances, le vent de face, le relief, vous devez pédaler à 80 tours par minute au moins.... en conservant l’intensité choisie. Il va sans dire que de petits développements s’avèrent indispensables. Le débutant ou le pratiquant d’âge mur prendra soin de choisir un vélo équipé d’un triple plateau. Ils sont proposés pour les passionnés de montagne mais se montrent tout à fait adaptés à la pratique de loisir en région vallonnée. Le VTT est une discipline encore plus ludique. Sa pratique en pleine nature le rend des plus attrayants. Aussi, est-il largement conseillé dans ces circonstances. En effet, le plaisir est un ingrédient indispensable pour pratiquer... toute la vie durant. Cependant, le VTT se révèle insidieusement trop intense. Un passage rocailleux, une pente abrupte, ... et voilà votre système cardiovasculaire qui s’emballe et votre poitrine qui s’essouffle. Alors, votre médecin du sport vous conseille amplement le VTT de loisir, mais «ne vous mettez pas dans le rouge »...
L’intensité de l’activité doit être moyenne. Il s’agit d’une pratique «en endurance » car à cette vitesse vous pouvez durer... sans endurer. L’exercice, à fréquence cardiaque élevée, au-delà du seuil de l’essoufflement, se révèle nuisible. Vous le savez désormais, il a plutôt tendance à engendrer des hypertensions artérielles. Trop modéré, l’effort ne provoque pas les adaptations physiologiques souhaitées. En pratique, il faut se situer en relative aisance respiratoire. Dans ces conditions, vous avez la possibilité d’exprimer une phrase de 6 à 8 mots sans vous interrompre.
Pour vous aider dans l’évaluation de l’intensité, il existe maintenant des cardiofréquencemètres. Il s’agit d’une montre indiquant avec précision votre fréquence cardiaque. Elle est reliée par onde électromagnétique à une ceinture thoracique située en regard du cœur. Ainsi équipé, vous pouvez faire référence à une fourchette de fréquence cardiaque correspondant grossièrement à cette intensité. Vous devez vous situer à environ 75 de votre fréquence cardiaque maximum.
La fréquence cardiaque maximum théorique est égale à 220 moins votre âge en années.
FC max = 220 - âge en année
Si vous avez 40 ans, votre FC max est de 220 - 40 = 180 battements par minute.
La fourchette de travail optimum en endurance se situe donc autour de 180 x 0,75 = 135, soit environ 130 à 140 battements par minutes.
Le sport d’endurance, pratiqué à ce niveau d’activité, se révèle très efficace pour la prévention de l’hypertension. En cas d’hypertension artérielle avérée, votre médecin, guidé par les chiffres trouvés au cours de votre test d'effort, vous indique plus précisément l’intensité choisie. Il vous invite à ne pas dépasser la fréquence cardiaque à laquelle vous atteignez 24 / 12.
La "règle des trois 3 "est à la base du traitement de l’hypertension artérielle par le sport :
3 fois par semaine
30 minutes à 1 heure
Pendant 3 mois au moins, pour évaluer l’efficacité.
« Trois fois par semaines » est la fréquence la plus adaptée. Avec un entraînement bien réparti , un jour sur deux environ, l’organisme ne perd pas l’acquis entre les séances. Les adaptations favorables persistent. Parallèlement, le corps a le temps de récupérer. Il n’y pas de risque de surmenage. Le sport ne devient pas un stress constituant le lit d’une hypertension...
« Trente minutes à une heure » est la durée optimale pour voir s’installer les effets physiologiques de l’effort cardiovasculaire d’intensité moyenne. Plus long, l’entraînement pourrait se révéler épuisant, source d’une fatigue chronique à la base d’une hypertension artérielle.
« Trois mois » est le laps de temps minimal pour voir s’instaurer les résultats concrets sur les chiffres tensionnels. Mais, il ne faut pas désespérer avant 6 mois, délai à partir duquel le succès est encore plus net. Comme n’importe quel médicament pour la tension, pour faire durer les effets, il faut poursuivre le traitement. L’activité physique est prescrite à vie. Voilà un bon prétexte pour bénéficier du même coup de tous les bienfaits de l’exercice.
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