Vous aimez le footing. Vous pratiquez pour le plaisir, la ligne, la forme ou la compétition. Mais, vous avez conscience que la course à pied n’est pas un sport complet. A ne faire que du jogging, vous craigniez de vous blesser ou de réveiller de vieilles lésions. Vous pensez qu’une préparation physique spécifique pourrait vous aider à progresser. Faîtes de la salle !
Par le Docteur Stéphane CASCUA, médecine du sport et entraînement du sportif.
Le jogging s’intègre à votre hygiène de vie. Vous prenez soin de votre silhouette. Vous souhaitez rester dynamique. Un complément « santé forme » s’impose. Puisque vous travaillez les jambes en courant, programmez de musculation des membres supérieurs. Optez préférentiellement pour un parcours de « cardio muscu ». Afin de ne pas commettre d’erreur de mouvement, évitez les haltères, utilisez les machines à charge guidées. Pour chacune d’elle, trouvez la charge approximative vous permettant de réaliser 30 à 50 répétitions. Ainsi, les contraintes articulaires et tendineuses sont modérées. Limitez la récupération au temps nécessaire pour changer de poste. Alternez les groupes musculaires et l’orientation des gestes : poussez, tirez, montez et descendez.
Enchaînez ces exercices pendant 15 minutes à 1 heure en fonction de vos progrès et du temps dont vous disposez. Un entraînement de ce type brûle beaucoup de calories, beaucoup plus que la méthode traditionnelle. De cette manière, il participe efficacement à la maîtrise de votre poids. Vous affinez votre silhouette et vous dessinez vos reliefs musculaires sans prendre de masse. De fait, mesdames, ce concept est aussi fait pour vous ! Cette activité quasi continue et le choix de séries longues met à contribution votre système cardiovasculaire en endurance, c’est un vrai programme « santé forme ». Bien sûr, messieurs, si le look est votre priorité. Si vous ne craigniez pas de prendre du poids de muscle qui vous ralentira pendant votre footing, vous pouvez alterner avec une séance classique de musculation lourde. Dans ces conditions, pour équilibrer votre programme, considérez cet entraînement comme une contrainte cardiaque de type fractionné.
Du cardio pour le cardio ! Mais comment ?
Bien sûr, vous pouvez faire du tapis ! Rien de plus spécifique ! Vous pouvez l’utiliser régulièrement pour évaluer votre condition physique et vos progrès. Augmentez la vitesse de 0,5 km/h toutes les minutes. Mettez 1,5 % de pente pour compenser l’absence de résistance de l’air. Lorsque vous commencez à être essoufflé, vous êtes au seuil. Quand votre fréquence cardiaque ne monte plus malgré l’accélération, votre allure du palier précédent correspond à votre « vitesse maximale aérobie » ou VMA. Le tapis est également indiqué pour effectuer de séance de renforcement ultra-spécifique. Mettez de la pente, ne dépassez pas 8 à 12% pour ne pas trop modifier votre foulée, sauf si vous préparez un trail avec de forte ascension. A l’inverse d’une sortie réalisée sur le relief voisin, cette séance ne comporte pas de descente. Voilà qui préserve vos articulations. En l’absence de souci locomoteur, le tapis permet de réaliser des séances au seuil et de fractionné à vitesses parfaitement calibrées. En revanche, si vous avez plus de 40 ans et quelques blessures à votre actif, n’hésitez pas à effectuer vos séances dures sur les autres appareils. Autant la course à vitesse de compétition améliore votre rendement, autant apprendre à courir à VMA n’a pas vraiment d’intérêt ! Les plus pointilleux rétorqueront qu’à cette allure on renforce les muscles de la propulsion. C’est vrai ! Mais qu’ils se rassurent, ils verront dans la suite de cet article que le gain de force n’a pas été oublié ! Et la stratégie suggérée est bien moins agressive pour les articulations. Déjà, travailler entre 80 et 100% de sa puissance aérobie sur vélo, sur elliptique, sur rameur inclut une véritable composante de musculation ! A vélo, se mettre en danseuse reproduit assez bien une grimpette à fort dénivelé. Les séances de biking en musique vous offre l’opportunité d’une séance intense et ludique. Sur rameur et sur elliptique, la sollicitation du buste et des bras en font une véritable séance de gainage. Sur le premier, le verrouillage lombaire se révèle très bénéfique. Sur le second, la mise à contribution des chaînes diagonales renforce les abdominaux obliques et lui confère un excellent transfert vers le geste de la course et son balancier des bras. Sans compter que la mise à contribution des membres supérieurs accroît la consommation d’oxygène et augmente le travail cardiovasculaire ainsi que pulmonaire.
Gainage instable et musculation fonctionnelle pour le coureur.
Le coureur a besoin de faire du gainage ! Il ne s’agit pas d’un lieu commun ou d’un concept vague à la mode depuis peu. Il consiste à fixer les points d’appui osseux des muscles participant directement au mouvement. Si tel n’était pas le cas, les muscles accrochés au bassin le feraient osciller en tout sens au lieu de mobiliser les membres inférieurs. Si votre gainage est imparfait, des mouvements parasites viennent altérer votre rendement et vous risquez des douleurs vertébrales. Plus les exercices sont variés ou proche du geste de la course, plus la méthode est efficace. On dit «transférable» vers la discipline choisie. De fait, vous comprenez bien l’exemple de l’elliptique contre forte résistance. Vous saisissez aussi l’intérêt d’un travail en instabilité puisque le corps du coureur est toujours en mouvement. La descente en trail en offre un exemple caricatural. Ainsi, on explique le peu de pertinence du gainage traditionnel, stable, réalisé sur les avant bras, dans une posture éloignée de la course. L’instabilité peut être obtenue de nombreuses manières, typiquement en restant assis sur gros ballon ou «Médecine Ball». Les cours de Pilâtes font la part belle à cet équipement. La stabilisation du centre de gravité situé au cœur du bassin se révèle très cohérente avec la problématique d’une foulée rentable ! Mesdames n’hésitez pas … et messieurs franchissez le pas ! La musculation fonctionnelle est aussi très intéressante pour le coureur. Elle dynamise le gainage en sollicitant de longues chaînes musculaires. Elle renforce les jambes et met à contribution le système cardiovasculaire. Elle se pratique en réalisant des exercices associant membres supérieurs et inférieurs. Elle s’inspire des gestes sportifs ou des mouvements de manutention. Sur le plateau de musculation, en instabilité, elle peut s’effectuer couché sur Médecine Ball. Il est aussi possible de faire simultanément des squats sur coussins mous de proprioception et des exercices de renforcement des bras. Pour ces derniers, utilisez soit des haltères légers, soit un portique à double colonne de charges comportant des poulies réglables en hauteur. De cette façon, on peut imaginer une grande variété d’exercices. Le travail global du corps et le gainage dynamique est également à votre disposition dans de nombreux cours collectifs. Les entraînements avec sangles suspendues type TRX, le cross Fit et le Pump tiennent du même esprit.
Musculation spécifique en « surfatigue » pour le coureur
Contrairement à l’idée reçue, la musculation des membres inférieurs est très utile pour le coureur. Elle vous permet de limiter le risque de blessures et d’améliorer vos performances. Le gain de force assure un véritable gainage du membre inférieur : cheville, genou et hanche restent dans l’axe. Ainsi, vous équilibrez les pressions sur les différents compartiments articulaires et vous prévenez l’usure du cartilage. Vous réduisez aussi les torsions et les frottements tendineux et vous diminuez la probabilité de tendinite. Freiner le retour du mouvement, augmente la force dite excentrique. Cette adaptation assure un meilleur amortissement à la réception de chaque foulée et préserve vos articulations. A l’occasion de ce type d’exercice, les fibres contractiles tirent dans un sens pour ralentir le mouvement alors que les enveloppes musculaires partent en sens inverse emmenées par l’articulation. En réaction à ces contraintes, les assemblages protidiques assurant la jonction entre ces deux structures se multiplient et se renforcent. Je vous rappelle que l’éclatement de ses montages moléculaires est à l’origine d’une perte de force lors des efforts prolongés, suivie de courbatures quand l’inflammation enclenche le nettoyage de ces microlésions. Ainsi, vous comprenez que le renforcement excentrique améliore l’efficacité gestuelle en fin d’épreuve et diminue les douleurs musculaires du surlendemain. Les séries longues avec charges légères améliorent considérablement l’utilisation de l’oxygène par les muscles. Les brûlures musculaires ressenties sont provoquées par l’acide lactique venant se fixer sur les récepteurs à la douleur. Ce dernier provient de la dégradation du glucose en l’absence d’oxygène. De fait, il est à l’origine d’adaptation biologiques entraînant le muscle et son environnement à optimiser le prélèvement et l’utilisation de ce gaz précieux. Pour cela, les capillaires, les petits vaisseaux, traversant le muscles se multiplient. Les mitochondries, les micros centrales énergétiques bourrées d’enzymes, prolifèrent dans les cellules musculaires. Ces adaptations sont appelées « composantes périphériques » de la consommation maximum d’oxygène ou VO2 max. Elles s’opposent aux composantes dites centrales qui concernent le cœur et les globules rouges. Elles n’en sont pas moins importantes et participent fortement à la performance aérobie. Ce type de travail contribue aussi à la prévention des crampes particulièrement au niveau des mollets et des ischiojambiers situés à l’arrière de la cuisse. En pratique, faites votre musculation des jambes après votre séance de cardio, surtout dans les suites d’un entraînement fractionné. Le muscle déjà fatigué aura moins besoin de travailler pour créer les adaptations bénéfiques. On parle de renforcement en « surfatigue ». Faites des séries longues avec des charges légères. Ce concept se définit par la possibilité de faire 30 à 50 répétitions alors que la dernière est incomplète pour cause de faiblesse et de brûlures musculaires ! Cette méthode est parfaitement validée et constitue le seul critère d’efficacité notamment pour les adaptations d’endurance locale. De surcroît, elle reste pertinente malgré une charge approximative puisqu’une large fourchette de répétitions est possible. Dans ces conditions, une seule série suffit ! Vous pouvez néanmoins poursuivre votre renforcement mais en variant les exercices et les charges pour booster vos adaptations psychomotrices. Afin que les gains de force soient bien transférés vers la course, il faut que le geste s’en rapproche au maximum. Ainsi, faites de la presse sur 1 seule jambe, en alternant droite et gauche. Pliez modérément le genou, sans dépasser 45° sauf si vous préparez un trail très pentu. Terminez sur la pointe des pieds. Insistez sur le freinage. Parfois même, lorsque la charge est légère, lancez le mouvement et veillez à amortir la réception. Il est possible aussi de réaliser des mini squats sur une jambe. Prenez des haltères dans les mains ou placez votre pied sur un coussin mou de proprioception. Afin de poursuivre les adaptations au cœur même des muscles, terminez votre séance par de la musculation en endurance localisée. Même si le mouvement se dégrade pour cause de fatigue, votre coordination spécifique de la foulée n’en est pas affectée. Alors, enchaînez avec la chaise à quadriceps, à ischiojambiers, à adducteurs et à fessiers. Continuez avec la presse à mollets et la hip machine. Terminez par 5 minutes de vélo en moulinant. Rapidement, vous vous sentirez plus endurant, plus tonique et plus rapide en course à pied !
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