Tout au long de notre évolution, notre aptitude au mouvement a été sélectionnée ! La course, l’endurance et le geste technique ont fait de nous des Hommes !
Par le docteur Stéphane CASCUA, médecin du sport.
Il y a environ 6 millions d’années, en Afrique, notre lignée humaine se séparait de celle des « grands singes ». Depuis, nous sommes devenu des virtuoses de la bipédie ! Nous sommes taillés pour la randonnée, la course, le basket et le football. A l’inverse, nos cousins actuels, les chimpanzés, gorilles et bonobos sont de piètres marcheurs. Lucy, la plus célèbres des australopithèques, âgée de trois millions d’années, ne se déplaçait guère mieux.
Du sport à l’origine de l’Homme !
Il y a 1,7 millions d’années, Homo Ergaster s’adapte à la course ! Les paléontologues disent de sa grande silhouette élancée qu’elle rappelle déjà celles des chasseurs Massaïs. Ses gros orteils se rapprochent de l’axe du pied. Son articulation perd l’aptitude à attraper les branches pour grimper aux arbres mais elle se situe désormais dans le sens de la propulsion. Les hanches, les genoux et les chevilles se redressent. La tension musculaire et tendineuse qui en résulte améliore considérablement la tonicité du pas. La verticalisation impose un bassin en entonnoir pour accueillir les viscères. L’évasement supérieur accroît la puissance des muscles fessiers. La démarche n’est plus «chaloupée», le buste est stable, la foulée est rentable ! Homo Ergaster perd sa pilosité. Comme peu d’animaux, il acquiert la capacité de transpirer ! Il peut désormais évacuer efficacement la chaleur produite par ses contractions musculaires. Il est apte à se déplacer plus vite et plus longtemps ! Toutes ces qualités physiques ont fait de nos ancêtres d’excellents chasseurs. Informés par les vautours qui tournoient au loin, ils arrivent avant les autres charognards. Très endurants, ils finissent par épuiser les proies qu’ils poursuivent. Infatigables marcheurs, ils échappent aux aléas climatiques, partent pour de longues migrations, quittent l’Afrique et vont conquérir le monde ! L’Homme moderne y reviendra pour courir le marathon des sables !
Un gros cerveau de footballeur !
Un des gènes régulant la multiplication des neurones mute et le volume du cerveau augmente. Le bas bassin s’est refermé et empêche le passage d’une grosse tête lors de l’accouchement. Il n’en fallait pas plus pour condamner l’espèce humaine à une naissance prématurée. Le cerveau continuera à grossir dans les années qui suivront. En attendant, il est immature. Le petit homme ne sait pas marcher avant un an ! En contre partie, il peut tout apprendre ! Voilà qui le différencie profondément de l’animal qui se déplace précocement mais dont les possibilités motrices restent limitées. L’homme devient expert en lancé de pierre taillée, de sagaie et de flèches. Il chasse à merveille, il nourrit de mieux en mieux ce cerveau qui ne cesse de se développer. Il adopte des stratégies de groupe pour piéger et empaler ses proies. De nos jours, l’archer atteint le centre de sa cible et le golfeur revendique le talent de faire birdy. L’équipe de football travaille son collectif pour tirer dans les buts !
Du sport pour sauver l’espèce ?
Les hommes du Paléolithique brûlaient entre 3000 et 3500 kilocalories par jour. C’est en étudiant les Bushmen actuels dont le mode de vie est comparable que les scientifiques sont parvenus à cet ordre de grandeur. Aujourd’hui, un comptable sédentaire qui va au bureau en métro consomme environ 2500 kilocalories par jour … et 2625 s’il marche 30 minutes quotidiennement. Pour atteindre la dépense énergétique d’un «chasseur cueilleur», notre comptable devrait courir une heure tous les matins. Etonnamment, dans la grande étude menée par PAFFENBARGER, cette dépense énergétique correspond à la quantité optimum d’exercice. En dessous, on minimise les bénéfices de l’activité. Au-delà, les méfaits empiètent sur les avantages. Notre corps est programmé pour brûlé autant de calories que les hommes du paléolithique. Il y a 10 000 ans, le Néolithique faisait de nous des agriculteurs qui bêchaient et labouraient. Il y a plus d’un siècle, la révolution industrielle nous a transformé en mineurs et en manutentionnaires. Voilà seulement 50 ans que la majorité d’entre nous reste assise toute la journée ! La sédentarité ne représente que 0,00001 de notre évolution depuis que notre lignée a divergé de celles des «grands singes». Nous sommes loin d’avoir sélectionné les gènes protecteurs ! Les mutants insensibles à l’inactivité, à l’excès de cholestérol, au diabète et à l’hypertension artérielle n’existent pas encore ! Vous comptez sur le vélo et la marche à pied pour éviter le réchauffement climatique et sauver la planète ! Le VTT et le jogging se révèleront sûrement plus utile pour sauvegarder l’espèce !
L’HOMME EST UN TROTTEUR !
Le quadrupède a le choix. Pour se déplacer rapidement, il galope, il avance simultanément ses membres postérieurs. Lorsqu’il est moins pressé, il trotte, il déplace alternativement ses pattes arrières. L’homme et ses cousins les « grands singes », se sont orientés vers cette dernière option. Et, les bipèdes trotteurs se sont répandus sur toute la planète … En Australie, sur l’île continent, une espèce endémique a évolué vers la bipédie sans pouvoir conquérir le monde. Elle a choisi de se déplacer au galop. Grâce à de longs leviers osseux, elle saute à pieds joints. Vous avez reconnu les kangourous.
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