Par le Docteur Stéphane CASCUA, médecin du sport
Vous avez été victime d’une entorse. Prudence ! A l’issue des délais habituels d’arrêt sportif, votre ligament n’est pas encore solide ! Pendant des mois, le tissu continue à évoluer et à s’organiser. Explications et conduite pratique !
Le ligament est une cordelette fibreuse reliant un os à un os. Il guide et limite le mouvement d’une articulation. Il s’abîme lorsque l’amplitude du geste est excessive, c’est l’entorse. Il est constitué de fibres microscopiques. Ces dernières baignent dans une gélatine riche en eau. Elles sont orientées dans l’axe des contraintes mécaniques. 90% d’entre-elles portent le nom de « collagène » ; il s’agit de molécules solides et rigides qui coulissent les unes sur les autres. On trouve aussi des fibres plus souples appelées « élastine ». La mobilisation spontanée d’une articulation augmente la longueur du ligament de 10%. Le ligament contient aussi des cellules qui synthétisent les fibres, on les appelle des « fibroblastes ». Il est traversé par des vaisseaux sanguins apportant les nutriments nécessaires à l’entretien de ce tissu. On y trouve aussi des nerfs qui informant le cerveau de la tension des ligaments
Entorse : quelles lésions selon la gravité ?
Dans l’entorse bénigne, il se produit des déchirures dans les fibres microscopiques mais le ligament conserve sa continuité et sa longueur. Les rameaux nerveux sont irrités par le mouvement violent et par l’inflammation. Cette dernière permet le nettoyage des microfibres lésées et initie leur remplacement. L’échographie qui montre les tissus mous visualise légèrement gonflé mais bien tendu. En cas d’entorse moyenne, une portion du ligament est déchirée mais il n’est pas atteint sur toute son épaisseur.
UN SAIGNEMENT CARACTÉRISE UNE RUPTURE COMPLETE
On dit que la lésion est « macroscopique ». Elle est bien vue à l’échographie. L’inflammation est importante et l’articulation est gonflée. Lors d’une entorse grave, la totalité du ligament est sectionné. Les vaisseaux sont eux aussi déchirés et le saignement est abondant. L’échographie met en évidence deux moignons ligamentaires qui ne se tendent lors du mouvement articulaire.
Les mécanismes de la cicatrisation
Quel que soit le stade lésionnel, on assiste à la survenue d’une inflammation. A l’occasion d’une lésion bénigne ou moyenne, les résidus tissulaires suffisent à activer le processus. En cas de saignement, de petites cellules spécialisées s’agglutinent pour combler la brèche en quelques minutes, ce sont les plaquettes. Ces dernières libèrent de puissant messager de l’inflammation, les cytokines. Ces molécules attirent sur le site de la lésion des macrophages. Il s’agit de globules blancs spécialisés dans le nettoyage des déchets tissulaires. Cette phase de détersion dure quelques jours. L’étape suivante correspond à l’arrivée et à la multiplication des fibroblastes. Vous le savez, ces derniers produisent des fibres ; elles vont s’accumuler et remplacer peu à peu le caillot.
EN 6 SEMAINES, VOTRE LIGAMENT EST CONTINU … MAIS RESTE FRAGILE
En 3 à 6 semaines la continuité est rétablie mais le ligament obtenu n’est pas solide. Les microfibres sont immatures et enchevêtrées. La troisième étape porte le nom de maturation et mécanisation. De nouvelles fibres vont apparaitre, il s’agit d’un collagène plus résistant et de l’élastine. Les microfibres vont s’orienter dans l’axe des contraintes.
A 6 MOIS, LE LIGAMENT EST A 50% DE SA SOLIDITÉ
3 à 6 mois après le traumatisme, le ligament reste deux fois moins solide que la structure initiale ! A l’échographie, le ligament reste longtemps plus épais et sa structure fibreuses moins homogène.
Conséquences pratiques !
Le nettoyage de la lésion et l’arrivée des cellules réparatrices sont stimulés par l’inflammation. Il faut éviter les anti-inflammatoires ! En plus, ils inhibent l’agrégation plaquettaire et perturbe sérieusement la constitution du clou tissulaire dans la brèche ligamentaire. Ils sont à proscrire pendant les 2 premiers jours.
COMPLICATION LA PLUS FRÉQUENTE : LA RÉCIDIVE
A l’inverse, plusieurs semaines après le traumatisme, il arrive qu’une inflammation persiste. Les processus de nettoyage digèrent les fibres saines et font perdurer les douleurs. Une infiltration peut s’avérer opportune. La cicatrisation est guidée par le mouvement. Quelques jours d’immobilisation peuvent se révéler bénéfique pour rétablir la continuité tissulaire mais très vite il faut guider la cicatrisation. Des contraintes mécaniques sont nécessaires pour orienter les fibres dans l’axe des contraintes. Les chevillières ou les genouillères permettent d’éviter les mouvements dangereux mais assurent des mises en tensions bénéfiques. La kinésithérapie doit être débutée précocement pour mobiliser en douceur les tissus lésés.
CHEVILLERE, GENOUILLERE, STRAP : DES MOIS SANS COMPLEXE !
Elle permet aussi d’entretenir la force et la coordination. Malgré ces recommandations, le ligament reste longtemps fragile. Quelques précautions paraissent utiles. Pendant des semaines poursuivez vos exercices de coordination. Les kinésithérapeutes parlent de proprioception. Prenez appui avec une jambe sur votre matelas et fermez les yeux. Intégrez des exercices d’équilibre à votre échauffement. Il peut être recommandé de conserver longtemps une chevillière ou une genouillère. Les sportifs professionnels sont adeptes de cette stratégie. Aucun risque de perte de coordination ! Au contraire, pendant des mois, sur le terrain, vous travaillez votre stabilité articulaire sans faire d’entorse ! Voilà un vrai travail spécifique et efficace !
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JONCTION LIGAMENT OS … C’EST ENCORE PLUS LONG !
A chacune de ses extrémités, le ligament vient s’amarrer sur l’os. Cette zone est complexe. Plusieurs tissus se succèdent : le ligament, la membrane péri-osseuse et l’os rigide. Si vous avez abîmé votre ligament à cet endroit : Patience ! Classiquement, la constitution de la cicatrice est plus délicate et plus longue !
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