En médecine du sport, il est un adage : « Toute douleur sur le côté du coude est un tennis-elbow… sauf 1 fois sur 10 ! ». Peut-être faites-vous partie des 10 % d’originaux ! Alors pourquoi avez-vous mal ? Comment peut-on vous soulager ?
Par le docteur Stéphane CASCUA, médecin du sport.
Un tennis-elbow est une lésion du tendon des muscles qui relèvent le poignet et étendent les doigts, au niveau de son insertion sur l’os du bras : l’humérus. Ce point d’accrochage se situe sur la face latérale du coude, du côté du pouce. Il présente des microdéchirures et devient douloureux. Le nom de cette blessure s’explique par sa fréquence élevée chez le joueur de tennis. Elle se comprend par la puissante contraction de ces muscles lors du revers mais aussi par leur mise en tension en serrant la raquette et en fin de service. Elle survient rarement à haut niveau. Elle est favorisée par des fautes techniques, un matériel inadapté ou des modifications trop rapides. Un « jeu trop physique » décompense rapidement ces imperfections. Citons par exemple : un poignet mal verrouillé pendant le revers ou un excès de slice au service, un grip trop serré, une raquette trop lourde en tête ou un cordage trop tendu. Le traitement passe par la correction de ces erreurs… parfois même par le repos ! On y ajoute souvent de la rééducation, voire une infiltration.
Parfois, c’est le sac articulaire.
L’articulation du coude est entouré d’un sac appelé « membrane synoviale ». Il contient le lubrifiant biologique, la « synovie ». Quelquefois, il se constitue un repli qui vient se glisser entre les os du bras et de l’avant-bras, entre l’humérus et le radius. Pour certains médecins, cet élément anatomique n’est pas une anomalie, plutôt une particularité comparable à un ménisque. Toujours est-il que cette frange peut se coincer et gonfler… Et le cercle vicieux s’enclenche : plus il gonfle, plus il coince ! Aux douleurs s’associent des sensations d’accrochage ou de blocage. À l’IRM, on visualise ce repli. Une infiltration permet souvent de le désépaissir et de restaurer un mouvement articulaire harmonieux. Parfois, c’est une manipulation ostéopathique qui le libère et replace la tête du radius qui avait fini par se décaler. Plus rarement, une intervention est nécessaire pour le sectionner.
De temps à autre, c’est le cartilage.
Le cartilage tapisse les os au niveau des articulations. Il s’agit d’une substance lisse et nacrée qui favorise les roulements et les glissements. Lorsqu’il est usé, il ne se répare pas, c’est l’arthrose. L’arthrose est rare aux membres supérieurs qui ne supportent pas le poids du corps. En revanche, dans les sports de lancer ou de raquette, le geste est si ample que les pièces osseuses finissent par se cogner et abîmer le cartilage. Le plus souvent, l’impaction se produit à l’arrière de l’articulation, non loin du siège douloureux du tennis-elbow. En fin d’extension, lorsque vous lâchez votre frappe, la pointe du coude remonte et percute l’arrière de l’humérus. Le cartilage s’ébrèche et vous avez mal. Lors de l’examen réalisé par votre médecin, l’hyperextension reproduit vos symptômes. Une infiltration apaise l’inflammation. Des protecteurs du cartilage relancent un soupçon de cicatrisation. Surtout, il faut modifier votre geste, mieux contrôler la fin du mouvement, peut-être frapper moins fort et vous montrer plus « technique ». Parfois, lors des chocs, de petits fragments s’échappent dans l’articulation. Ils irritent la membrane articulaire ou se coincent. Vous ressentez des accrochages ou des blocages. Dans ces circonstances, quelques manipulations parviennent à libérer le coude mais, rapidement, une opération doit être envisagée. Plus tard, ces coudes toujours meurtris peuvent basculer dans l’arthrose.
Quelquefois, c’est un nerf coincé.
Un nerf passe non loin du point d’accrochage à la face latérale du coude. Il s’agit d’une des ramifications du nerf qui longe le radius. Classiquement, il est comprimé dans le tunnel fibreux qui lui permet de traverser un muscle de l’avant-bras, le « long supinateur ». Les sports de raquette favorisent cette lésion car ils provoquent une hypertrophie de ces masses musculaires. Parfois, cette branche nerveuse est prise dans la cicatrice fibreuse du tendon déchiqueté. Vous comprenez alors pourquoi la souffrance du nerf et le tenniselbow classique sont, de temps à autre, intriqués. En cas de coincement nerveux, vous présentez une douleur sur le côté du coude mais aussi des irradiations qui descendent le long de l’avant-bras, vers le pouce et l’index. Elles surviennent pendant l’entraînement mais, classiquement aussi la nuit. Votre médecin du sport parvient aussi à les déclencher quand il appuit sur le siège de la compression, au niveau du coude ou sur le tunnel musculaire. Un examen appelé « électromyogramme » étudie la conduction de l’influx électrique le long du nerf et confirme l’altération de sa propagation en regard de la compression. Les infiltrations constituent la thérapeutique habituelle. Elles limitent l’inflammation donc le gonflement du nerf et l’épaisseur des tissus environnants. La branche nerveuse est moins irritée et moins comprimée. Massages et étirements complètent le traitement. Il arrive qu’une opération s’impose pour libérer le nerf, on parle de « neurolyse ».
Rarement, c’est une souffrance musculaire.
Cette fois, votre douleur est plus diffuse, elle peut partir du coude mais envahit rapidement l’avant-bras. Les muscles qui verrouillent le poignet s’hypertrophient du fait de l’entraînement. Le sac fibreux qui les entoure peine à se distendre aussi vite. Les masses musculaires se retrouvent à l’étroit. Le phénomène s’aggrave à l’effort : les muscles se contractent, la pression augmente, le sang ne parvient pas à les irriguer. Ces derniers se gorgent d’oedèmes et un cercle vicieux débute. Cette lésion porte le nom de « syndrôme de loge ». Il est plus fréquent aux membres inférieurs. Les coureurs de fond présentent alors des douleurs à l’avant de la jambe et certains peinent à remonter le pied. À l’avant-bras, il reste exceptionnel et touche surtout les pratiquants de motocross qui doivent stabiliser le guidon malgré d’intenses vibrations. Plus rarement encore, ce sont les tennismen les plus « cogneurs » qui en sont victimes. Les formes débutantes s’améliorent quelquefois en réduisant l’intensité des sollicitations. Il est alors conseillé d’utiliser des techniques kinésithérapiques de drainage pour faire dégonfler les muscles. On y associe des massages défibrosants pour assouplir les membranes de la loge. Le plus souvent, seule une intervention chirurgicale est efficace. Elle consiste à ouvrir le sac musculaire afin de décomprimer les muscles.
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