La nature et les salles de musculation sont compatibles ! Mieux encore, un programme spécifique de renforcement protège vos articulations et améliore vos performances de trailer. Plus de muscle, c’est plus de plaisir !
Par le docteur Stéphane CASCUA, médecine du sport et entraînement du sportif
Deux notions clés guident le concept de la « muscu pour le trail » : freinage et instabilité. Il faut réparer votre appareil locomoteur à la descente et aux terrains irréguliers, progressivement, en limitant le risque de blessure. Lors des réceptions de foulées en contrebas, les articulations se fléchissent, emmenant avec elles les tendons et les membranes entourant les muscles. Les fibres musculaires tirent puissamment en sens inverse, contrôlent et ralentissent le mouvement. Au point de jonction et dans les tendons, les contraintes sont énormes, des microdéchirures se produisent. Inflammations, courbatures, diminution de la force, altération du contrôle articulaire succèdent à la course en descente. Microlésions tendineuses et tendinites surviennent parfois. La « musculation de freinage » vous prépare progressivement à assumer ces contraintes, tout en évitant les impacts sur votre squelette. Quand votre pied reprend contact avec le sol, il est irrégulier, fait de pierres, de trous et de racines. Un programme de renforcement standard risque de figer vos schémas moteurs et d’altérer votre coordination. À l’inverse une « musculation instable » vous y adapte sans risque et améliore votre « proprioception ».
La chaise à quadriceps : au dessus de votre force maximum !
Le quadriceps est le principal muscle propulseur et freinateur du membre inférieur. Il faut peaufiner son adaptation. Lorsque vous descendez en trail, vous courez vite, vous faites de grands bonds… que vous seriez bien incapable de réaliser en sens inverse, dans le sens de la montée. Votre cuisse ne parviendrait pas à vous propulser suffisamment fort…, alors qu‘elle arrive à ralentir le mouvement. Votre force maximum de freinage dite « excentrique » est supérieure à votre force maximum de poussée dite « concentrique ».
C’est dans ces conditions extrême que vous sollicitez vos muscles en dévalant les pentes en trail. Pour vous y entraîner, montez avec les 2 jambes une charge légèrement supérieure à celle que vous pourriez soulever avec une seule. Descendez-la uniquement avec une seule. Effectuez 8 à 15 répétitions du même côté puis inversez. Faites 3 séries en augmentant progressivement la charge. Ne dépassez pas 120 % de force maximum « concentrique » à une jambe. Vous réalisez un travail « supra maximum excentrique ». C’est idéal pour vous préparer au trail.
La presse en instabilité
Sur presse, vous ne faites pas l’exercice classique. L’adaptation musculaire est particulièrement spécifique. Il faut vous rapprocher au maximum de la position et du mouvement du coureur. Utilisez une seule jambe. Ne dépassez pas la flexion inhérente à la course soit 30 à 45°. Parfois vous pouvez atteindre 90 à 110° pour reproduire le travail en côte. Terminez sur la pointe du pied. Placez le dossier presque à l’horizontale pour retrouver le buste droit du coureur. Et surtout, pour le trail, placez sous votre voûte plantaire un coussin gonflable d’instabilité (en vente sur Internet ou dans la grande distribution sportive). De cette façon vous entraînez votre stabilisation articulaire. Vous gagnez en force tout en améliorant votre coordination. Travaillez votre force endurance. Faites 30 à 50 répétitions. La dernière doit être très difficile ou incomplète (voir l’article sur le blog de SantéSportMag : « Une série ça suffit »). Renouvelez l’exercice 2 à 4 fois mais en variant un peu la charge ou l’angle maximum de flexion. La récupération est courte, elle s’effectue pendant que vous faites l’exercice avec la jambe opposée. Bien évidemment, travaillez aussi votre « force supra maximum excentrique » sur presse. Poussez avec vos 2 jambes une charge légèrement plus importante que le poids maximum soulevé avec une seule. Descendez-la uniquement avec 1 jambe. Là encore, effectuez 8 à 15 répétitions du même côté puis inversez. Faites 3 séries en augmentant progressivement la charge sans aller au-delà de 1,2 fois la force maximum de poussée à une jambe. Ce travail global du membre inférieur est appelé « triple extension » car le genou mais aussi la hanche et la cheville s’étendent. Ce mouvement ressemble plus à votre foulée que la « chaise à quadriceps ». L’enchaînement idéal consiste à commencer par les exercices de presse et à poursuivre par ceux réalisés sur « chaise ». Dans cet ordre, le geste le plus spécifique de la foulée ne voit pas sa coordination perturbée par une fatigue musculaire locale. En revanche, le quadriceps, victime privilégiée des microlésions, termine de s’épuiser… et de s’adapter à l’aide d’un exercice ciblé. On parle de « travail en surfatigue ».
ÉCHAUFFEMENT « MUSCU TRAIL »
Avant d’attaquer votre « séance de musculation spéciale trail », la salle de sport se prête bien à un échauffement spécifique. Commencez par trottiner sur le tapis pendant 10 minutes. Augmentez peu à peu la pente, allez jusqu’au maximum. Il est habituellement de 15 % mais sur certains modèles il atteint 40 % ! Terminez par 5 minutes de stepper dont le mouvement avoisine également celui du crapahut en montagne.
PRESSE PERSO INSTABLE
Vous n’avez pas accès à une salle ou vous souhaitez peaufiner plus encore votre préparation. Effectuez des mini squats sur une jambe. De la même manière, fléchissez modérément vos appuis. Insistez sur le freinage. Stabilisez bien votre membre inférieur, gardez votre rotule à l’aplomb de votre pointe de pied. Rapidement, optez pour un appui instable. Faites l’exercice sur votre matelas ou votre canapé. Pour vous alourdir, mettez votre sac à dos de trail, remplissez-le avec votre poche à eau et des bouquins. Cette astuce contribue aussi à la coordination de votre colonne vertébrale et au gainage de votre buste.
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